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Nr. 00265- 9th Jan. 2024 – Weekly Newspaper devoted to Science & Technology in Africa ** Pour la promotion de l'esprit scientifique en Afrique

Journée Scientifique Africaine 2011: la magie africaine en débat à Francfort (Allemagne)

C’est depuis 7 ans que l’organisation panafricaine African Development Initiative organise toujours en Octobre une journée scientifique entièrement consacrée à l’Afrique et aux Africains. À chaque édition, la participation est toujours à son comble, et les déabts houleux. L’an dernier, le panafricanisme était au centre des débats. Pour l’édition 2011, outre le grand projet des « État Unis d’Afrique », la magie noire, la sorcellerie africaine, les rites occultes, etc. se sont invités, soumettant les Hommes de sciences présents à des échanges parfois chauds. Extrait du rapport de la journée du 22 Octobre 2011.

 » Mais la journée scientifique africaine n’est pas que le lieu de retrouvaille des défenseurs de notre tradition. L’homme de science devrait normalement analyser avec toute la rigueur de l’art l’impact des traditions africaines sur le processus de développement. C’est ce que fait le professeur Joseph AGBAKOBA. Parmi les éléments de la tradition africaine qu’il considère comme de véritables facteurs de retard figure la forte croyance en la magie. Ce thème déjà abordé à la journée scientifique 2010 revient, cette fois dans le cadre d’une analyse autocritique de nos valeurs ancestrales. Et c’est l’œuvre de l’auteur Camerounais Etounga Manguelle qui lui sert d’angle d’attaque. L’auteur examine le point de vue d’Etounga Manguelle dans le contexte de la critique qu’il a reçu de l’africaniste Cudjoe Henry, et qui lui reproche, entre autres choses, de soutenir un projet raciste deservant les intérêts de l’Afrique. Le philosophe originaire du Nigéria salue l’initiative de l’auteur Etounga Manguelle qu’il considère comme un pas dans la bonne direction. En effet, comme il fait bien de le rappeler, l’autocritique est peu présente dans la production littéraire et scientifique en Afrique. Il y a donc de quoi louer toute entreprise intellectuelle dont le but serait de jeter un regard critique sur nous et nos façons d’agir, quitte à être taxé d’européocentriste. Il partage d’ailleurs la position de Manguelle selon laquelle la culture et les valeurs comptent pour beaucoup dans le sous-développement de l’Afrique. Toutefois, il estime que Etounga Manguelle ne démontre pas de façon convaincante la corrélation entre nos croyances (mœurs et coutumes) et l’état actuel de notre continent. L’auteur présente son point de vue sur le sujet, pointant un droit accusateur sur l’Afrique et ses traditions.

Comme il fallait s’y attendre, l’exposé du professeur AGBAKOBA est suivi d’une vive altercation de la part des participants. Même si nombreux sont ceux qui partagent sont avis, c’est une entreprise particulièrement risqué que de critiquer nos valeurs ancestrales et nos façons d’agir.

Contestant la position du professeur AGBAKOBA sur la place de la magie et de l’occulte dans la société africaine, un intervenant rappelle à son intention que la société occidentale d’aujourd’hui est entièrement ceinturée par des loges de toutes sortes, et que l’impact des dites loges sur le pouvoir politique n’est plus à démontrer. En clair, et selon notre intervenant, il n’y a pas qu’en Afrique que l’on vit la réalité de l’attachement à l’occulte. L’Europe présente également le profil d’une société entièrement régie par le magico-religieux, mais qui effectue notoirement des pas vers le progrès. De ce fait, présenter le solide attachement des africains au magico-religieux comme une des causes de notre sous développement est illogique.

Face à cette remarque, la réponse du professeur est simple : tout d’abord, que l’élite du pouvoir et l’élite intellectuelle des sociétés occidentales d’aujourd’hui soient membres des loges ésotériques n’a rien de si nouveau ni de si spécifique. Déjà, les recherches historiques ont prouvé que l’élite intellectuelle de l’Égypte antique, les philosophes en l’occurrence, diffusaient un enseignement d’inspiration spiritiste. Rien de si typiquement occidentale si les élites du pouvoir sont connectés aux « sectes ». Mais, malgré ce fait, il serait inexacte de soutenir que la croyance au magico-religieux a la proportion en Occident qu’en Afrique au sud du Sahara. Le professeur évoque la récurrence des crimes rituels dans les États africains qu’il a visités, les phénomènes de croyance collective aux forces occultes tant au niveau du pouvoir qu’à la base, le recours massif des populations aux tradi-praticiens, etc.

Que la position du professeur AGBAKOBA ait heurté certains participants dans leur fort intérieur semble être une évidence. En effet, le regard critique sur la société africaine a été toujours accompagné de gros risque. Objectivement, il parait exagéré de comparer une société profondément ancrée sur les valeurs de la laïcité et de la sécularité (la société occidentale) avec une autre entièrement embaumée par la superpuissance du marabout (l’Afrique au sud du Sahara). »

Source: African Development Initiative.

NB: Le rapport complet de la Journée Scientifique Africaine 2011 sera publié la semaine prochaine.

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