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Nr. 00265- 9th Jan. 2024 – Weekly Newspaper devoted to Science & Technology in Africa ** Pour la promotion de l'esprit scientifique en Afrique

L’autopsie traditionnelle chez les peuples d’Afrique noire: Sorcellerie ou Science?

Quand une personne meurt, elle n’est pour autant pas silencieuse. Elle continue à parler, et il suffit juste de bien savoir ou pouvoir l’écouter pour accéder à d’innombrables informations. La personne morte peut par exemple vous dire ceci : « j’ai été vraiment longtemps malade » ; « mon cœur a fini par céder »; ou encore : « j’ai été étranglée ».

Pratiquée généralement dans le but de faire la lumière sur les circonstances du décès d’une personne, en Europe tout comme en Amérique par exemple, l’autopsie est généralement commandée par l’autorité judiciaire, dans le cadre de ce qu’on appelle communément la « médecine légale ». Mais, elle n’est pas une pratique médicale exclusivement occidentale. Les peuples d’Afrique subsaharienne la pratiquent aussi. Mais, autrement. Les Bafou, peuples Bamiléké de l’Ouest Cameroun, connaissent cette pratique. Seulement, si l’autopsie « made in Europe » relève à n’en point douter de la science et fait d’ailleurs l’objet d’une spécialisation en faculté de médecine, celle pratiquée dans certaines sociétés traditionnelles africaines soulève plutôt des questions. Des questions sans réponses, comme l’illustre l’article que nous publions aujourd’hui avec l’accord de nos confrères de la famille Bafou (www.Bafou.org). 

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Attention! Images difficilement supportables 

L’autopsie traditionnelle à Bafou ou un ensemble de questions sans réponses

Que recherche t- on ? Qui cherche quoi ? À quels résultats aboutit-on ? L’autopsie se présente généralement sur deux modes, bien que les objectifs à atteindre soient presque les mêmes, à savoir, rechercher la cause de la mort. L’autopsie médico-légale pratiquée par des médecins sur réquisition de l’ordre judiciaire, vise à indiquer ce qui a provoqué la mort, dans le cas où pourraient être soupçonnés des cas de meurtres. Elle n’est pas l’objet de ce débat que nous ouvrons aujourd’hui. Nous voulons parler uniquement de l’autopsie traditionnelle : le nong gning. Certains usages voudraient que chez nous, nul ne meurt sans être tué. Par qui ? Et comment ? C’est la raison de l’autopsie pratiquée encore malheureusement chez nous. Il s’agit certainement d’un pan de notre ‘’culture’’, qui a traversé des siècles.

Le spectacle de ‘’le nong gning’’ est tout simplement insoutenable. Le défunt est disséqué ; on n’en ferait pas mieux d’un cochon, ou d’une chèvre. Les pratiquants de ce rite de dissection se recrutent chez des personnages à l’allure d’individus qui ne bénéficieraient plus de toutes leurs facultés. L’autopsie est pratiquée sur tous les morts, même dans les cas évidents. Un bonhomme mort des suites de cancer détecté par les hôpitaux, n’échappe pas à ce rite. Un pendu subit le même sort. Les victimes de sida, de choléra, de longue maladie, ne sont pas épargnées. Les accidentés, les morts subites constituent les morceaux de choix. Qui pratique l’autopsie ? Il ne s’agit manifestement pas de personnes maitrisant l’anatomie du corps humain telle que nous la connaissons, et encore moins les dégâts causés par certaines maladies.

Que trouvent-ils comme causes de la mort ? Mort parce que abattu dans la brousse. Mort pour être entré dans un lieu (ou une place) qui n’était pas le sien. Mort par malédiction. Mort parce que tué par le ntchop, tué par des sorciers (me ngang lekang). Mort parce que mangé par les vampires (meleuh). Encore que ces ‘’causes de la mort ne sont pas divulguées, mais chuchotées de bouche à oreille. Le nom du malfaiteur n’est jamais rendu public. Et, ce qui est curieux, après l’autopsie, suivent toujours des visites chez les voyants (meghang nga’h) qui essaieront aussi de déterminer les causes de la mort, sans jamais préciser qui en est l’auteur.

Dans ces conditions, on peut se demander ce à quoi aura servi l’autopsie. Quel crédit lui était il accordé par nos ancêtres ? Pourquoi ce rite jadis répandu sur presque tout le pays ne subsiste-t-il plus que dans les départements de la Menoua et des Bamboutos ? Ce rite résout-il les problèmes des familles ? Il y a lieu d’en douter, car les ‘’résultats’’ de l’autopsie entrainent généralement des maux aux conséquences énormes : désunion, méfiance, soupçon, rancune. Par ailleurs dans le but de se protéger d’éventuelles attaques prédites par l’autopsie, certains de nos frères perdent tous les repères, cherchent à se protéger des dangers qui la plupart de temps n’existent que dans leur imagination.

Les hommes d’Eglise, les autorités administratives et judiciaires ont beau parler, mais, peine perdue, la pratique est là et se porte à merveille. Avec les conséquences souvent désastreuses de la manipulation des corps par des mains inexpertes, avec l’expansion des maladies que pourraient drainer ces corps, (sida, choléra, etc..), il serait peut-être grand temps de passer à la phase répressive. En effet, la profanation des corps ou des tombes, -(certains morts sont exhumés et disséqués plusieurs jours après leur enterrement)- sont des délits prévus et punis par notre Code Pénal. Il ne saurait être dans notre intention de discréditer notre culture, mais plutôt de demander d’en extraire les aspects positifs que nous pourrons présenter à la face du monde, et sans honte. Comprenons aussi que la mort est quelque chose qui survient à chaque être. Nul ne peut en échapper ! Qui a demeuré éternellement sur la terre parce qu’il était un ngang lekang ? Ou parce qu’il a réussi à se protéger ? Enfin à notre naissance quelle durée de vie nous a été accordée par Dieu ? N’ayant aucunement la prétention de cerner ce pan de notre culture, Il me plait enfin de solliciter de vous tous un enrichissement de ce débat, pour que survive notre tradition, et que vivent nos familles.

Auteur:

Kemka KANA Victor 
Cet article fut d’abord publié le 05 Avril 2012 sur le site internet de la famille Bafou (www.bafou.org). Au regard de l’importance du sujet abordé, Africa & Science a demandé et obtenu l’accord de publication de nos confrères. Nos leurs sommes très reconnaissants.

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4 thoughts on “L’autopsie traditionnelle chez les peuples d’Afrique noire: Sorcellerie ou Science?

  • DONGMO dit :

    je pense que la pratique de l’autopsie constituie un grand danger pour la population . homme qui pratique cette chirugie sur un corps ne metrice pas l’anatomie de l’homme, parfois l’interpretation est douteux, je prends example le corps d’un homme qui est mort de suite d’un cholera ,apres cette pratique tout le village sera contamine

  • TEB dit :

    cette pratique très rrépendue dans les bambutos et la Menoua a prisune envergure qui depasse notre entendement.une enquete auprès de certains adeptes de cette pratique nous a revèlé que beaucoup parmi ceux qui se charge de charcuter les corps sont à la recherche de certaines parties de de l’anatomie qui leur servent dans la pratique de sorcelerie. Ilnous a été révèlé que si le defunt est « vampire » c’est cette pièce de vampirise qu’on recherche dans son ventre. il srai temps de se tourner vers les autorités pour faire cesser cette pratique qui devient plutot une source de mesentente entre les familles.

    • admin dit :

      Bonsoir,
      Merci pour votre témoignage si important. S’il vous plait, pouvez vous nous envoyer un article même d’une seule page sur le sujet? Cet article peut porter tout simplement sur ce que les gens en pensent. Selon vous, il est temps que les autorités interviennent. Mais selon certains adeptes de ces pratiques, il faut plutôt encourager cette « science ». Actuellement, et selon vous, qu’en pensent globalement les habitants de la localité?
      Au plaisir de vous relire.

      Admin
      Africa & Science
      http://www.africa-and-science.com

  • Lorie dit :

    C´est une pratique très répandue à l´Ouest du Cameroun et qui demande de nos jours de recherches approfondies chez tous les experts impliqués dans le domaine. Le débat ne fait que commencer car chaque génération doit apporter des réponses adéquates aux problèmes de son temps et ne point observer les traditions comme des simples spectateurs d´un match.
    Lorie